Rencontre avec le Maire de Paris.
La rencontre annoncée et attendue depuis plusieurs semaines entre le
Maire de Paris et l'ensemble des cadres A s'est tenue le 5 mai à la
salle Georges Carpentier.
Rassemblant une importante assistance, la rencontre s'est déroulée en
plusieurs temps : intervention de l'adjoint chargé des personnels, présentation
des résultats de l'observatoire social, intervention du secrétaire général,
restitution des groupes de travail préparatoires et intervention du
Maire.
François DAGNAUD a ouvert la séance
en déclarant que cette réunion, exceptionnelle par son ampleur (2.000
cadres A conviés) s'inscrivait dans une volonté de dialogue du Maire
de Paris. Il a rappelé sa profonde confiance dans les cadres et a déclaré
comprendre leurs interrogations. Selon lui, les cadres réagissent à
une profonde évolution de la municipalité : nouveaux projets, émergence
de l'arrondissement, changement des modes de fonctionnement interne
et plus forte implication des élus.
Après avoir souligné qu'élus et cadres doivent concourir à un même objectif,
servir au mieux les Parisiens, il a rappelé que les cadres étaient un
maillon décisif de l'administration. Leurs revendications spécifiques
ne sont pas illégitimes, mais découlent de la contrepartie de leur responsabilité.
Ils ont une place capitale dans la réussite des priorités, l'exécutif
reconnaît leurs capacités et le Maire est attentif à leur situation.
Les résultats de l'observatoire social
font ressortir une très forte implication des cadres A dans cette enquête
(représentant un peu plus de 8% des effectifs, ils ont fourni 21% des
réponses). Leurs attentes ne sont pas différentes de celles de l'ensemble
du personnel, sauf sur l'A.R.T.T., dont la mise en œuvre les satisfait
nettement moins que les autres catégories d'agents.
Pierre GUINOT-DELERY a ensuite tenté
d'apporter une réponse à une interrogation récurrente dans l'encadrement
: à quoi sert le Secrétaire Général ?
Préalablement, il pense que la question de l'arbitrage traduit un malentendu
: la décision relève des élus et le S.G. ne peut s'ériger en arbitre
entre ceux-ci et l'administration municipale.
Pour lui, le S.G. doit veiller à la bonne exécution des décisions de
l'exécutif, en coordonnant les services et en étant attentif au respect
de la nature et du calendrier des projets, ainsi qu'aux contraintes
budgétaires.
Il doit aussi concevoir l'adaptation des services et des ressources
humaines et financières aux missions, dans un souci de dynamisation
permanente. Pour cela tous les chantiers de modernisation ont été lancés
en même temps, car les délais sont courts.
Il assume pleinement le rôle de Secrétaire Général, avec quelques objectifs
prioritaires :
- Enrichir et développer les outils de pilotage, pour une meilleure
cohérence des actions ;
- Réformer la fonction ressources humaines, chantier en cours sur lequel
les cadres sont les premiers concernés ;
- Mettre en œuvre le schéma directeur informatique, dans lequel devra
désormais entrer toute action d'informatisation ;
- Relancer la communication interne, dont il a rappelé qu'elle commence
par le dialogue des encadrants avec leurs collaborateurs directs ;
- Rationaliser la gestion du patrimoine municipal, avec dans un premier
temps d'importants travaux de rénovation imposés par les impératifs
de sécurité, et un objectif à 3-4 ans de rationalisation des implantations
administratives, trop éclatées ;
- Réussir la déconcentration, sans remise en cause du statut et de l'unicité
de la fonction publique parisienne.
Pierre GUINOT-DELERY a conclu en soulignant sa volonté de poursuivre
et approfondir le dialogue, sans que cela se fasse au détriment du dialogue
institutionnel. Mais l'objectif final est toujours de mieux répondre
aux attentes des administrés.
Trois cadres ont ensuite rapporté les conclusions
des groupes de travail qui avaient préparé cette rencontre
dans les directions, présentant les attentes des cadres selon trois
thèmes : les circuits de décision, les conditions d'exercice de la fonction
de cadre, les conditions de carrière et de mobilité.
Les circuits de décision.
Soumis à des facteurs internes : mise en œuvre de projets nouveaux et
forte implication des élus, et externes : réforme du code des marchés,
loi S.R.U., 35 heures, ils sont marqués par la multiplication du nombre
des intervenants dans le processus de décision, le développement de
structures transversales, les commandes multiples dans des délais très
contraignants. Les cadres ont le sentiment que la gestion quotidienne
est dévalorisée.
Ils demandent tout d'abord une clarification des circuits, avec hiérarchisation
des priorités, désignation d'un correspondant au Secrétariat Général
et détermination d'un calendrier.
Réclamant des précisions sur le rôle du Secrétaire Général, les cadres
sont préoccupés par une insuffisante coordination et un manque d'arbitrage.
Ils attendent du responsable de l'administration parisienne qu'il assure
la transition entre le temps du politique et celui de l'administratif.
Rappelant enfin que les cadres s'attachent à mettre en œuvre avec loyauté
et efficacité les orientations des élus, ils souhaitent un développement
de l'expertise de projet, une homogénéité des procédures, une harmonisation
des échelons de décision et du découpage territorial des compétences,
et une précision du positionnement des cadres leur donnant une vue exacte
des objectifs et des moyens.
Les conditions d'exercice de la fonction de cadre à la Ville.
Les cadres ne souhaitent pas être un frein pour les politiques, mais
ils relèvent une détérioration de leurs conditions de travail et une
augmentation des risques pour eux.
Ils prennent en exemple le nouveau code des marchés publics qui offre
une procédure simplifiée très souple dont la Ville a volontairement
choisi de se priver, obligeant ainsi au lancement de marchés lourds
pour des montants parfois modiques.
Ils dénoncent également la multiplication des intervenants, source de
surcharge de travail, les dérives dans l'utilisation de moyens tels
la messagerie électronique et le mauvais usage des réunions, en nombre
croissant, et peu productives, car ne se traduisant souvent par aucune
prise de décision.
Concernant la mise en œuvre de l'A.R.T.T., les cadres, qui dérogent
quotidiennement aux règles, et ont des problèmes pour prendre leurs
congés et leurs J.R.T.T., ont été soumis à une obligation de gain de
productivité, et s'éloignent de plus en plus de leur métier de base
pour consacrer un temps croissant à des procédures.
Soumis à une demande grandissante de concertation de la part des élus,
ils dénoncent le peu de considération marquée par ceux-ci aux affaires
quotidiennes en regard des grands projets.
Ils s'interrogent légitimement sur le rôle que veut leur faire jouer
la municipalité : collaborateurs ou experts ? Ils rappellent que la
municipalité doit s'appuyer sur ses cadres, mais ceux-ci s'essoufflent
et les bonnes volontés s'étiolent.
Les conditions de carrière et la mobilité.
Pour les cadres, les carrières à la Ville ont perdu beaucoup de leur
attractivité : possibilités d'avancement réduites, retard dans la transposition
des textes régissant les corps de référence, recrutement faisant très
largement appel à des cadres de l'extérieur, accueillis en détachement
ou recrutés par contrat sur des emplois ayant vocation à être tenus
par des titulaires.
Les groupes de travail mis en place pour réfléchir sur les améliorations
concernant de nombreux corps n'ont pas encore vu la concrétisation de
leurs conclusions, pourtant formalisées depuis longtemps.
Et la N.B.I., dont bénéficient les cadres territoriaux, ceux de l'Etat
et les directeurs et sous-directeurs de la Ville n'est toujours pas
attribuée aux cadres A de la Mairie.
Aussi, de plus en plus nombreux sont ceux qui partent à l'extérieur,
où leurs compétences sont reconnues et appréciées.
La mobilité est une des conditions essentielles d'un déroulement de
carrière harmonieux. Or les demandes ne sont généralement autorisées
par la hiérarchie que sous réserve de remplacement, freinant de fait
tout mouvement et contribuant à la démobilisation des cadres.
Concernant la formation, elle est bien souvent insuffisante ou inadaptée,
en particulier pour les agents arrivant sur un nouveau poste, et tout
spécialement en début de carrière. Il est absolument indispensable de
mettre en place un dispositif de formation préalable à la prise de poste,
ainsi qu'une gestion personnalisée des parcours professionnels.
Toutes ces mesures sont plus que nécessaires et doivent être mises en
œuvre.
Après ces interventions, très longuement et chaleureusement applaudies,
l'assistance manifestant ainsi son accord avec ce qui venait d'être
dit, il revenait à Monsieur Bertrand DELANOË
de répondre et conclure.
Le Maire a souligné l'importance de ce rendez-vous qu'il concevait comme
une libération de la parole pour ceux qui font vivre l'administration
parisienne.
Il a rappelé avoir toujours défendu l'honorabilité des fonctionnaires
parisiens, qui constituent une richesse pour la municipalité. Les cadres
sont des collaborateurs particuliers dont il a entendu les interrogations
et l'insatisfaction. Il se propose donc de faire évoluer les choses.
Les cadres ont dénoncé la lisibilité insuffisante de l'organigramme
parisien.
Le fonctionnement de la Ville a évolué depuis 2001. la mise en place
d'une nouvelle équipe municipale s'est traduite par de nombreux projets
d'envergure et simultanés et une implication des adjoints plus importante
que lors des exercices précédents, transformant les manières de travailler.
Mais priorités politiques et réalités techniques ne peuvent s'ignorer.
Le maire attache une grande importance au dialogue avec les cadres qui
ne sont pas de simples exécutants mais des acteurs de la politique de
la municipalité qui doit s'appuyer sur leur énergie et leur professionnalisme.
Il propose donc trois axes de travail :
- Hiérarchiser les projets, pour une meilleure lisibilité de la démarche,
ce qui est une demande légitime des cadres. Ceci passe par un renforcement
de la communication interne, car il est anormal que les cadres ne soient
pas informés en temps réel des grandes orientations municipales.
- Préciser le rôle de chacun en définissant des circuits de décision
fermes et intangibles qui s'imposeront à tous, y compris aux élus. Le
Secrétaire Général coordonnera les actions transversales, de plus en
plus nombreuses.
- Améliorer la gestion des ressources humaines. Le chantier est déjà
lancé, mais constitue une charge de travail considérable. François DAGNAUD
étudiera l'amélioration de la mise en œuvre de l'A.R.T.T. La D.R.H.
devra mettre en place une évaluation professionnelle tous les cinq ans,
accompagnée d'une personnalisation du parcours professionnel avec obligation
de mobilité et attention privilégiée aux outils de formation.
Mais des défis importants sont à relever : la décentralisation que prépare
le Gouvernement et la volonté municipale de maîtriser la pression fiscale,
le budget primitif devant désormais être la référence.
Le Maire déclare faire confiance au professionnalisme et à l'intelligence
des cadres. Il considère les rencontres telles celle-ci comme utiles
et souhaite renouveler l'expérience au moins tous les deux ans.
Pour lui, au delà des interrogations de ce jour, il y a l'histoire de
Paris, dans laquelle l'administration parisienne a toujours joué un
rôle important.
L'U.C.P. reconnaît qu'il y a une première avancée en matière de discussion,
mais considère que cette rencontre ne remplace pas le dialogue institutionnel.
Elle aurait préféré que la municipalité accepte de s'ouvrir aux questions
de l'assistance. Elle restera enfin attentive à la mise en œuvre des
annonces faites ce jour et ne manquera pas, le cas échéant, de les rappeler
aux élus.
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